
Une étape cruciale vient d’être franchie pour l’économie Congolaise. L’Assemblée Nationale a adopté, dimanche 15 juin, à une écrasante majorité de 354 voix sur 363 votants, la loi modificative de la loi n° 22/069 du 27 décembre 2022 relative à l’activité et au contrôle des établissements de crédit. Ce vote marque le début d’une réforme structurelle majeure du secteur bancaire en République Démocratique du Congo (RDC).
Portée par Olivier Kasanda Katuala, député et membre de la majorité présidentielle, cette réforme vise à aligner le cadre juridique Congolais sur les standards régionaux et internationaux, en vue d’encourager la bancarisation, de renforcer la compétitivité du secteur et de favoriser la relance économique, conformément à la vision du Chef de l’État, Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo.
Un secteur asphyxié par des exigences inadaptées
Depuis juillet 2023, les quinze (15) banques Congolaises opéraient dans un vide juridique, incapables de satisfaire à l’obligation d’avoir au moins quatre actionnaires significatifs, une disposition sans équivalent ailleurs en Afrique. Cette contrainte a mis en péril la légalité des banques, particulièrement celles dont l’actionnariat est unique ou fortement concentré, comme c’est le cas des filiales panafricaines et internationales.
De plus, le cadre réglementaire imposé par la Banque Centrale du Congo (BCC) reste parmi les plus rigides du continent. Avec un capital social minimum de 50 millions USD, bien au-dessus de celui exigé dans des régions comme la CEMAC ou l’UEMOA (10 à 25 millions USD), et des frais d’agrément très élevés, la RDC s’était rendue peu attrayante pour les investisseurs.
Les réformes introduites
Malgré les résistances du Ministère des Finances et de la BCC, favorables au maintien du statu quo, la nouvelle loi apporte plusieurs réformes majeures : Suppression de l’obligation des quatre actionnaires significatifs, supprimant un frein majeur à la structuration des banques locales ; Allègement de la gouvernance, avec l’instauration d’un minimum de deux actionnaires ; et Simplification des exigences d’actionnariat, pour mieux refléter les pratiques internationales.
Nouvelle autorité pour la BCC, désormais habilitée à fixer les quotités de participation des actionnaires, bien que cette disposition suscite des inquiétudes quant à l’indépendance des structures bancaires.
Si cette réforme est un signal fort en faveur de la modernisation du secteur, les risques restent nombreux. Le phénomène de « De-risking », qui pousse certaines institutions financières internationales à se désengager du marché congolais par crainte de blanchiment ou de financement du terrorisme, continue d'affaiblir la crédibilité du système bancaire.
Olivier Kasanda Katuala, auteur de la tribune qui accompagne cette réforme, insiste : « Ces ajustements répondent à l’urgence de restaurer la conformité légale des banques et de renforcer l’attractivité du secteur ». Il plaide également pour une révision de l’article autorisant la BCC à fixer les quotités, afin de préserver la liberté actionnariale, garante de la confiance des investisseurs.
Prochaines étapes
La loi doit encore passer l’épreuve du Sénat en septembre 2025, où elle sera examinée par la commission Économie et Finances (Ecofin). En cas d’approbation, elle sera transmise à la Présidence pour promulgation.
Cette réforme, si elle est définitivement adoptée, pourrait constituer une avancée décisive pour la relance économique de la RDC, dont le taux de bancarisation demeure inférieur à 10 %. Un signal fort, à la fois pour les opérateurs économiques, les partenaires financiers et la population congolaise en quête d’inclusion financière.
Diddy MASTAKI