
Alors que les moustiques envahissent la ville de Goma avec l’arrivée de la saison des pluies, les habitants font face à une montée inquiétante des cas de paludisme. Un danger sanitaire aggravé par le manque criant de moustiquaires imprégnées d’insecticide à longue durée (MILD), dont la distribution est aujourd’hui pratiquement paralysée à cause de l’insécurité persistante dans plusieurs quartiers, due à la présence du groupe armé M23.
Dans des zones comme Buhene, Munigi ou encore Kibati, en territoire de Nyiragongo et dans certains quartiers populaires de Goma comme Majengo et Ndosho, la peur et les combats fréquents rendent quasi impossibles les activités humanitaires, y compris celles liées à la prévention du paludisme.
« Même quand les moustiquaires sont disponibles, il est difficile de les acheminer jusqu’aux zones rouges. Néanmoins, nous n'avons pas de stocks importants pour toucher toute la communauté. Le seul petit lot que nous disposons est réservé aux femmes enceintes et allaitantes. Les humanitaires ne prennent pas de risques, et les populations sont laissées à elles-mêmes », témoigne un agent de santé communautaire à Goma.
Un système de santé débordé
Dans des structures sanitaires de Goma, les files d’attente s’allongent chaque jour. Les cas de paludisme, notamment chez les enfants, ne cessent d’augmenter.
« Le paludisme revient en force, et nous manquons de moyens pour y faire face. Dans la ville et ses peripheries, aucune protection n’est assurée contre les piqûres de moustiques », déplore un infirmier.
Les conditions de vie da la capitale provinciale du Nord-Kivu, souvent improvisés et insalubres, favorisent la reproduction des moustiques. Les femmes enceintes et les enfants paient le plus lourd tribut. Les témoignages se multiplient : les familles dorment sans aucune précaution contre cette maladie devastatrice, exposées chaque nuit aux risques d'infection.
Les autorités sanitaires locales reconnaissent l’impact direct de l’occupation militaire sur les campagnes de santé publique.
« Les zones contrôlées par le M23 sont inaccessibles. Même à Goma, les tensions sécuritaires compliquent la mobilisation logistique. Résultat : la population n’a plus accès aux moustiquaires, pourtant essentielles », explique un membre de relais communautaire interrogé par congorassure.cd.
Pendant ce temps, les moustiques prolifèrent dans les eaux stagnantes et les abris précaires. Sans intervention rapide, les conséquences pourraient être dramatiques, préviennent les ONG locales.
Appel à une réponse humanitaire adaptée
Face à cette situation, les organisations de la société civile appellent à une réponse humanitaire adaptée au contexte de guerre. Elles demandent la mise en place de couloirs humanitaires sécurisés pour permettre la distribution ciblée des MILD dans les zones affectées.
« La santé ne peut pas attendre la fin des combats. Il faut agir maintenant, sinon c’est une autre crise sanitaire cette fois qui va exploser », alerte Nicole Kavira, défenseure des droits des femmes.
Dans une ville déjà meurtrie par les conflits, la lutte contre le paludisme devient un autre champ de bataille, silencieux mais tout aussi meurtrier.
Diddy MASTAKI