
À Goma, dans l'Est de la République Démocratique du Congo, une dissociation économique déconcertante se manifeste. Malgré un regain de vigueur du Franc Congolais (FC) face au dollar américain, le pouvoir d'achat des citoyens s'effondre. Le cours du change, un baromètre économique, a pourtant envoyé des signaux encourageants. Le dollar, qui oscillait récemment entre 2900 et 3000 FC, a vu sa côte chuter pour s'établir dans une fourchette de 2200 à 2500 FC.
Des habitants de Goma, interrogés par CONGORASSURE.CD, s'attendaient logiquement à ce que le raffermissement de la monnaie nationale se traduise par une décote des biens importés et, par conséquent, un sursaut du pouvoir d'achat. Cependant, la réalité du terrain est contrastée. Les étals des marchés n'affichent qu'un impact marginal de cette embellie monétaire sur le coût des denrées de première nécessité. Les produits essentiels, dont les tarifs sont souvent corrélés au billet vert, maintiennent des prix prohibitifs, alourdissant le fardeau de la vie quotidienne pour la majorité des Gomatraciens.
Pour Jonh Murhula, un expert local en économie monétaire, cette disparité entre les indicateurs macroéconomiques et le ressenti microéconomique est un véritable dilemme. Il souligne que la valorisation du FC apparaît comme une victoire purement statistique, incapable de se matérialiser par une amélioration tangible des conditions de vie. Pire, elle exacerbe le sentiment de précarité dans une ville déjà meurtrie par une insécurité chronique.
Muyisa Freddy, acteur de la société civile locale, avance que la volatilité du taux de change, même lorsqu'elle est favorable (comme l'appréciation actuelle), ne parvient pas à endiguer la dynamique inflationniste. Selon lui, les acteurs du marché, habitués à l'instabilité perpétuelle, sont peu enclins à répercuter immédiatement et intégralement la baisse du dollar sur leurs tarifs de vente.
Il explique cette résistance par l'anticipation de futures dépréciations potentielles. Les commerçants préfèrent conserver leurs marges, craignant de devoir ajuster les prix à la hausse dans un bref délai.
Un opérateur économique a confié à CONGORASSURE.CD que ce phénomène révèle la fragilité structurelle de l'économie locale. Le coût de la vie y est fortement soumis à des pressions exogènes, et l'ajustement déflationniste des prix est souvent léthargique et incomplet, en nette opposition à la rapidité des hausses observées lors des phases de dépréciation.
Cette amélioration éphémère du Franc Congolais, loin d'être une bouffée d'oxygène, ne fait qu'accentuer la gravité de la crise socio-économique qui accable Goma.
Daudi Amin