Dans un rapport accablant publié mercredi 18 juin 2025, l’organisation de défense des droits humains Human Rights Watch (HRW) accuse le groupe armé M23, soutenu par le Rwanda, d’avoir déporté de force plus de 1 500 civils Congolais vers le Rwanda depuis la partie Est de la République Démocratique du Congo. Ces actes, selon HRW, constitueraient des crimes de guerre au regard du droit international humanitaire.
Ce rapport documente avec précision comment, entre février et mai 2025, les combattants du M23 ont démantelé des camps de déplacés autour de Goma, rassemblé des populations civiles, puis les ont illégalement transférées vers le Rwanda, parfois avec la complicité du Haut-Commissariat des Nations-Unies pour les Réfugiés (HCR).
« Le transfert forcé de civils vers le Rwanda, qu’ils soient citoyens Congolais ou réfugiés Rwandais, constitue un crime de guerre. Étant donné le contrôle qu’exerce le Rwanda sur le M23, il est responsable des abus commis par ce groupe », a affirmé Clémentine de Montjoye, chercheuse senior à HRW, dans ce rapport daté du 18 juin 2025.
Une situation assimilable à une occupation
Selon HRW, le Rwanda exerce un contrôle effectif sur des zones de l’Est Congolais via ses propres forces et le M23, ce qui correspondrait juridiquement à une occupation belligérante, au sens des Conventions de Genève de 1949. À ce titre, le transfert ou la déportation de civils hors du territoire occupé est strictement interdit par l’article 49 de la Quatrième Convention de Genève.
Dans son rapport du 18 juin, HRW décrit en détail comment, du 17 au 19 mai, des convois ont quitté le Centre Chrétien du Lac Kivu (CCLK) à Goma pour traverser la frontière vers le Rwanda. Huit témoins affirment que le transfert s’est fait contre leur volonté, en présence de soldats du M23 qui encerclaient le centre pour éviter toute fuite.
Le HCR sous pression
Dans une lettre adressée à HRW en date du 27 mai, le HCR reconnaît que ses équipes ont procédé à des vérifications « sous pression » et que le retour de certains réfugiés au Rwanda était présenté comme « la seule option possible ». Or, HRW rappelle qu’un transfert forcé reste un crime de guerre, même si le déplacement semble consenti sous contrainte.
Ce rapport souligne par ailleurs que les autorités Rwandaises sont connues pour persécuter ceux qui critiquent publiquement le régime, y compris des réfugiés rapatriés ou demandeurs d’asile.
CPI : vers une enquête sur les crimes de guerre
Ce rapport du 18 juin 2025 intervient alors que la Cour pénale internationale (CPI) a annoncé la reprise des enquêtes sur les crimes commis dans le Nord-Kivu depuis janvier 2022. La CPI pourrait ainsi poursuivre les responsables pour déportation ou transfert forcé de population, que ce soit en tant que crime de guerre ou crime contre l’humanité.
« Une pression internationale concertée est nécessaire pour que le Rwanda cesse immédiatement ces pratiques, garantisse la sécurité des civils et poursuive les auteurs de ces graves violations », conclut HRW dans son rapport.
Des témoignages glaçants
HRW s’appuie sur de nombreux témoignages recueillis entre février et mai 2025. À Karenga, un village du territoire de Masisi, des combattants du M23 ont menacé de tirer sur quiconque refuserait de partir. À Sake, à l’Ouest de Goma, près de 2 000 personnes ont été déplacées de force, dont certaines conduites au Stade de l’Unité à Goma, puis désignées comme « sujets Rwandais ».
Le M23 aurait même brûlé des cartes d’électeurs Congolaises, seule preuve d’identité pour beaucoup de citoyens, et forcé des Congolais à retourner au Rwanda sous prétexte d’origine Rwandaise présumée.
Ce rapport de HRW, daté du 18 juin 2025, jette une lumière crue sur la gravité des crimes commis dans l’Est du Congo. Il interpelle la communauté internationale, le Conseil de sécurité de l’ONU et les cours internationales à agir de manière urgente pour la protection des populations civiles.
Diddy MASTAKI