Un nouveau dialogue s’est ouvert ce lundi 23 juin 2025 à Aru, dans la province de l’Ituri, entre les autorités congolaises et plusieurs groupes armés encore actifs dans la région. Ce forum, baptisé ARU2, bénéficie du soutien de la MONUSCO et ambitionne de raviver le processus de paix dans cette province de l'est de la RDC, dévastée par des conflits intercommunautaires et des violences armées depuis 2017.
Depuis l’éclatement des hostilités, l’Ituri a connu des milliers de morts, principalement des civils, et plus d’un million et demi de personnes déplacées. Malgré de nombreuses initiatives, la paix reste fragile et plusieurs localités demeurent encore sous le contrôle de groupes armés. Les autorités congolaises, avec l’appui constant de la MONUSCO, n’ont cessé de multiplier les efforts de stabilisation. Parmi ces efforts figurent des dialogues politiques, dont le plus récent, ARU1, tenu en juin 2023, avait donné naissance à un premier accord de paix signé par les groupes CODECO, ZAIRE, FRPI, FPIC, TCHINI YA TUNA et MAPI.
Deux ans après ce premier accord, le bilan est contrasté. Si certaines avancées ont été enregistrées, notamment la réouverture de plusieurs axes routiers et marchés, et le retour volontaire de déplacés dans le sud d’Irumu, d’autres objectifs restent inachevés.
« ARU1 a été un demi-succès. Tous les points n’ont pas été mis en œuvre, mais un pas important a été franchi », analyse Firmin Koné Massagnou, de la Section des affaires civiles de la MONUSCO/Ituri. Parmi les acquis d’ARU1, on note le retour de 60 % des déplacés dans certaines zones d’Irumu, une période d’accalmie générale entre juin et novembre 2023, la réouverture de routes stratégiques entre Fataki, Masumbuko, Drodro, Roe, Iga-Barrière, Nizi et Mongwalu, l’accessibilité des marchés à toutes les communautés dans le territoire de Djugu.
Ce nouveau cycle de discussions, qui se tient du 23 au 27 juin 2025, réunit les leaders des groupes armés, des représentants communautaires, des ONG, ainsi que des responsables civils et sécuritaires. Il vise à évaluer les résolutions d’ARU1, à en renforcer la mise en œuvre, et surtout à signer un nouvel acte de cessation des hostilités.
Les attentes sont claires : restaurer la sécurité, relancer les activités économiques et permettre le retour définitif des déplacés.
« Il faut maintenant terminer le travail », insiste Firmin Koné Massagnou pour qui « une paix durable permettra aux communautés de se reconstruire et à la province de valoriser ses richesses naturelles et humaines. »
Jean-Marie Ezadri, acteur de la société civile, appelle à une implication accrue des leaders communautaires pour convaincre les miliciens de déposer les armes et de rejoindre le Programme de Désarmement, Démobilisation, Relèvement communautaire et Stabilisation (P-DDRCS). Sarah Muderwa, de l’ONG Synergie des jeunes filles de l’Ituri, plaide quant à elle pour que les accords à venir permettent de mettre un terme aux violences sexuelles, viols et assassinats qui ciblent les femmes et les jeunes filles.
Les discussions abordent également la nécessité de réinstaller les autorités administratives locales dans les zones déstabilisées. Chefs de chefferies, de groupements et d’autres entités doivent, selon les participants, retrouver leurs fonctions pour incarner l’autorité de l’État et garantir un climat de confiance durable.
Présent à l’ouverture des travaux, le général Antoine David Mushimba, commandant de la 32e région militaire, a lancé un appel aux jeunes miliciens :
« Saisissez la main tendue du Chef de l’État. Il est temps de tourner la page des armes et de construire la paix. »
La MONUSCO a réaffirmé son soutien à ce processus, soulignant son engagement à accompagner les communautés dans leur quête de stabilité. Le chemin vers une paix durable en Ituri reste semé d’embûches. Mais à Aru, pendant cinq jours, les voix s’élèvent à nouveau dans l’espoir que cette fois, elles couvrent définitivement le fracas des armes.
Par Joël Heri Budjo