Une déclaration cinglante et sans détours : c’est par une mise au point publique que l’ancien Gouverneur du Nord-Kivu et ministre du commerce extérieur de la RDC, Julien Paluku (2007–2019) a décidé de répondre à l’ex-ambassadeur Rwandais en RDC, Vincent Karega, qu’il accuse de « manipuler l’opinion internationale » au sujet de la présence des FDLR dans l’Est Congolais.
Dans ce texte aux allures de réquisitoire publié sur son compte X mercredi 02 juillet, l’ex-gouverneur retrace plus d’une décennie de gestion sécuritaire du Nord-Kivu, battant en brèche la rhétorique Rwandaise qui justifie les incursions militaires par la menace persistante des rebelles hutus des Forces Démocratiques pour la Libération du Rwanda (FDLR).
« Pendant douze ans, nous avons travaillé à neutraliser les résidus des FDLR, non pour protéger le Rwanda, mais pour sécuriser nos propres populations », affirme-t-il, rappelant que plusieurs opérations conjointes avaient été menées avec Kigali, notamment « Umoja Wetu » en 2009.
Une stratégie de recyclage dénoncée
L’accusation la plus grave portée contre Kigali est celle d’avoir délibérément orchestré un système de « recyclage » des FDLR. Selon cette mise au point, certains combattants Rwandais, déjà rapatriés au Rwanda, auraient été renvoyés clandestinement en RDC pour justifier de nouvelles interventions armées.
« Le contrôle biométrique en partenariat avec la MONUSCO et le HCR l’a prouvé. Le Rwanda réinjectait ses propres ex-combattants pour entretenir la crise », assure l’auteur, qui dénonce une manipulation géopolitique cynique.
Ce procédé, selon lui, visait à maintenir un prétexte pour « envahir la RDC » et continuer à bénéficier du chaos à la fois sur le plan politique, économique et diplomatique.
Un message à Vincent Karega : « le Congo t’a tout donné ».
Le ton monte encore d’un cran lorsque l’ancien Gouverneur s’adresse personnellement à Vincent Karega, l’accusant de trahison morale envers un pays qui l’a accueilli : « Le Congo t’a tout donné pour que tu parles correctement et que tu saches lire et écrire. Tu devrais te taire face au malheur des Congolais », déclare-t-il.
Il fustige également la défense du M23 par certains officiels Rwandais, y voyant une instrumentalisation ethnique comparable aux mécanismes ayant mené au génocide de 1994 au Rwanda. Pour lui, invoquer une prétendue marginalisation d’une ethnie Congolaise pour justifier une rébellion armée, c’est projeter sur le Congo les démons tribaux d’un autre temps.
Une page qui se tourne ?
Fait marquant : cette mise au point coïncide avec la signature récente, le 27 juin 2025 à Washington, d’un accord de paix entre la RDC et le Rwanda. L’auteur y voit une victoire tactique de la diplomatie congolaise : « Neutraliser les FDLR est une réponse intelligente à un piège tendu. Nous allons les éliminer, et ce sera la fin d’un épisode douloureux dans la région des Grands Lacs ».
Dans un clin d'œil symbolique, la tribune se termine sur une note personnelle : « Nous sommes le 02 juillet, jour de clôture de l’année scolaire… En ce 02 juillet, je clôture aussi mes tribunes sur cette thématique jusque fin 2025 ».
Cette sortie marque un tournant dans le discours des autorités Congolaises sur la question des FDLR et du rôle du Rwanda dans la partie Est de la RDC. Entre dénonciation de la duplicité diplomatique et appel à une mémoire collective lucide, elle met à nu les tensions persistantes malgré les promesses d’apaisement. Reste à voir si la paix de Washington tiendra face à ce lourd héritage de suspicion et de manipulation.
Diddy MASTAKI