En visite officielle de 48 heures en Ituri, province longtemps meurtrie par les violences armées, le Vice-Premier Ministre en charge de la Fonction publique, Jean-Pierre Lihau, a affirmé mardi que le gouvernement congolais veut « réparer les injustices administratives » et renforcer la présence de l’État dans les zones touchées par l’insécurité.
Mandaté par le Président de la République, Félix Tshisekedi, le membre du gouvernement a placé sa tournée sous le signe de la lutte contre la bureaucratie, de la réforme de la Fonction publique et de la solidarité envers les populations affectées par les conflits.
« Le gouvernement n’a pas oublié l’Ituri », a-t-il déclaré.
Face à la presse à Bunia, Jean-Pierre Lihau a insisté sur le caractère prioritaire de cette province dans l’agenda national. « Quelle que soit la longueur de la nuit, le soleil finit toujours par apparaître. Nous voulons montrer à la population iturienne que le gouvernement ne l’a pas oubliée ».
Le Vice-Premier Ministre a expliqué que sa mission vise aussi à exprimer officiellement le soutien de l’État aux communautés vivant dans les zones frappées par les groupes armés, où des dizaines de milliers de déplacés continuent de vivre dans des conditions précaires.
Réformes administratives la fin du « recrutement en désordre »
Jean-Pierre Lihau a également défendu les grandes réformes engagées par son ministère, notamment la rationalisation des recrutements au sein de la Fonction publique. Selon lui, les recrutements anarchiques effectués au fil des années « ont engendré les phénomènes NU et NP », des irrégularités massives dans les listes de paie de l’État.
Un nouveau statut du fonctionnaire, récemment promulgué, doit désormais imposer des règles strictes. Le Vice-Premier Ministre appelle à une vulgarisation rapide de ces normes pour garantir leur application dans tout le pays.
Carrières, retraite et rajeunissement de l’administration
La question de l’avenir professionnel des agents publics a occupé une grande partie de son discours. Lihau a annoncé des discussions locales sur les promotions, titularisations, avancements et surtout sur la retraite, un dossier longtemps négligé en province.
« Il faut permettre aux seniors de partir avec dignité et offrir aux jeunes la possibilité de prendre la relève », a-t-il souligné, évoquant un rajeunissement « qualitatif et compétitif » de l’administration.
Sécurité sociale, l’Ituri comme province pilote
Le Vice-Premier Ministre a confirmé l’inauguration imminente d’une agence provisoire de la Caisse Nationale de Sécurité Sociale des Agents Publics (CNSSAP) à Bunia. Un bâtiment définitif doit être construit d’ici fin 2026.
L’Ituri, déjà province pilote pour plusieurs réformes, servira de laboratoire à l’extension du système de protection sociale, notamment pour les fonctionnaires partant à la retraite.
« Nous sommes en guerre contre les antivaleurs »
Dans une partie plus politique de son allocution, Jean-Pierre Lihau a dénoncé les « injustices » subies par de nombreux fonctionnaires en province, blocages administratifs, dossiers dormant à Kinshasa, désactivation de la paie, absence de mécanisation.
« Kinshasa n’est pas le Congo. Beaucoup de fonctionnaires en province se sentent oubliés du système. Nous devons agir pour rétablir l’équité ».
Il a réitéré la nécessité d’une lutte ferme contre les antivaleurs, la corruption interne et les pratiques administratives opaques.
Militaires et policiers intégrés dans la Sécurité sociale
Autre annonce majeure, les militaires, policiers, veuves et orphelins seront désormais intégrés dans le régime de sécurité sociale des agents publics. « Ils se sacrifient pour la nation. L’État doit les protéger comme il protège les civils ».
Cette mesure doit couvrir, la retraite, les risques professionnels, la maladie, les accidents de travail.
Une visite sous haute attente
Cette visite officielle, dans une province où les tensions sécuritaires restent vives, est perçue localement comme un signal politique fort. Les acteurs administratifs espèrent que les promesses de Kinshasa se traduiront par un soutien concret, notamment dans un contexte de pénurie de moyens et d’instabilité persistante.
Le ministre a assuré que les résultats de cette mission seront suivis « de mesures concrètes, concertées avec le Gouverneur militaire et les responsables locaux ».
Joël Heri Budjo